Visite de la superbe exposition “Robert Doisneau “le merveilleux quotidien” au musée de la photographie de Nice.
Robert Doisneau est certainement le photographe du XXe siècle dont les clichés ont le plus marqué les esprits, notamment ses photographies en noir et blanc de Paris et sa banlieue après-guerre. Il se trouve à son aise dans la rue qu’il transforme en surface sensible, en digne héritier d’Eugène Atget (1857-1927) dont il admire les images et leur « rusticité qui défie le temps ».
L’appareil photo en bandoulière, Robert Doisneau avec son regard malicieux, est toujours aux aguets de la surprise et de l’imprévu afin de capturer l’essence du quotidien des gens, c’est un passant patient qui conserve toujours une certaine distance vis-à-vis de ses sujets. Ses photos sont souvent empreintes d’humour et d’ironie mais également de nostalgie et de tendresse, et son œuvre d’une franche humanité, est auréolée de magie.
Conçue en collaboration avec l’Atelier Robert Doisneau, cette exposition regroupant 110 clichés se décline en deux temps.
Le Merveilleux quotidien axé sur Paris et sa banlieue présente une sélection de 78 tirages anciens ou vintages, un aperçu de la carrière de Robert Doisneau des années 30 aux années 70 complété par deux grands montages en relief réalisés par l’artiste dans l’esprit de ce qu’on appellera bien plus tard des installations. Le visiteur est invité à renouer avec la simplicité et la beauté du quotidien dans un parcours où sont présentes des photos iconiques comme Le baiser de l’Hôtel de ville ou Mademoiselle Anita.
alm Springs 1960 est un reportage réalisé pour le magazine Fortune sur la construction de golfs en plein cœur du désert du Colorado. Avec le regard amusé d’un ethnologue improvisé, Robert Doisneau utilise la pellicule couleur pour restituer l’atmosphère factice de cette oasis pour riches et bienheureux retraités américains à l’opulence joyeuse. Le résultat est d’une modernité folle. Avec sa capacité à capter des moments de la vie ordinaire, pour les transformer en photos extraordinaires, Robert Doisneau livre un univers singulier et poétique, l’œuvre riche et diversifiée d’un photographe qui a marqué l’imaginaire collectif.
Palm Springs 1960
Depuis l’après-guerre, Robert Doisneau travaille régulièrement avec la presse américaine, c’est d’ailleurs pour une commande de Life, en 1950, qu’il a réalisé celle qui deviendra sa photo la plus célèbre : Le baiser de l’Hôtel de Ville. L’agence Rapho lui passe souvent des commandes pour le New York Times, Life ou Fortune.
Aux Etats-Unis, ses images sont également entrées au musée. En 1948, dans French Photographer’s today, il est exposé avec Brassaï, Ronis, Izis à la Galerie Photoleague à New York, et en 1951, Five french photographers au MoMA de New York avec Brassaï, Cartier- Bresson, Izis et Ronis. En 1954, l’Art Institute de Chicago lui offre une première exposition individuelle. En 1955, il fait partie des photographes sélectionnés par Edward Steichen pour The Family of Man au MoMA de New York.
Pourtant, il n’a jamais encore traversé l’Atlantique. Faute de moyens, il a laissé les photographies voyager à sa place. Le 19 novembre 1960, c’est pour réaliser un reportage pour le numéro de février 1961 du magazine américain Fortune, que Robert Doisneau prendra pour la première fois l’avion pour les Etats-Unis. Thème du reportage : la construction de golfs à Palm Springs, refuge des riches retraités américains dans le désert du Colorado.
Après une journée passée à New York, il arrive à Palm Springs le 21 novembre. Il y restera jusqu’au 1er décembre. Ce reportage ethnographique durera deux petites semaines. Ce qu’il découvre là-bas l’incite à dépasser largement le thème du reportage. Au-delà de l’empiètement des greens sur un territoire aride, il dresse un portrait amusé d’une planète artificielle repeinte aux couleurs les plus suaves. Il utilise tour à tour un Rolleiflex, un Leica et un Hasselblad et, pour la première fois se sert de la pellicule couleur à des fins résolument esthétiques. A-t-il eu du mal à passer à la couleur, lui le maître incontesté du noir et blanc ? Absolument pas ! Et d’ajouter : « Si c’était à refaire, je referai tout en couleur ».
[source: musée de la photographie de Nice]